Journal

novembre 21, 2024 0 Comments

La rentabilité des panneaux photovoltaïques en Suisse est en baisse

En Suisse, le solaire s’est imposé ces dernières années comme un pilier de la transition énergétique. Entre soutien politique, engouement citoyen et innovations technologiques, le photovoltaïque a longtemps été perçu comme un investissement à la fois écologique et rentable. Mais la réalité économique évolue : pour de nombreux propriétaires, la rentabilité recule, et les perspectives de gains financiers ne sont plus aussi attractives qu’il y a dix ans.

Des tarifs de rachat en recul constant

Le modèle initial du photovoltaïque reposait largement sur la revente de l’électricité produite. Dans les années 2010, les tarifs de rachat garantis permettaient aux ménages et entreprises de rentabiliser rapidement leurs installations. Aujourd’hui, cette dynamique s’essouffle : les gestionnaires de réseau rachètent l’électricité excédentaire à des prix bien inférieurs, parfois proches du tarif du marché de gros.

Alors qu’un kilowattheure pouvait autrefois être repris à plus de 20 centimes, certaines régies locales ne rémunèrent plus que 5 à 8 centimes/kWh injecté. Dans un contexte où les coûts d’installation restent élevés, cette baisse rogne fortement sur les marges attendues.

Des coûts d’installation et d’entretien à la hausse

À cela s’ajoute une hausse des coûts de construction et d’entretien. Les matériaux clés (silicium, cuivre, aluminium) subissent une forte pression sur les marchés mondiaux, et la main-d’œuvre spécialisée en Suisse reste onéreuse. Une installation domestique qui coûtait entre 20 000 et 25 000 CHF il y a quelques années peut désormais dépasser 30 000 CHF.

Le retour sur investissement, qui oscillait autrefois entre 8 et 12 ans, s’étend désormais souvent sur 15 à 20 ans, voire davantage dans les régions où l’ensoleillement est plus faible.

L’autoconsommation, clé de la rentabilité

Avec la baisse des tarifs de rachat, la rentabilité dépend de plus en plus de la capacité à consommer directement sa propre production. Chaque kilowattheure utilisé permet d’éviter d’acheter de l’électricité au tarif du fournisseur, généralement facturé entre 20 et 25 centimes/kWh.

Mais cette logique suppose une adaptation des habitudes : lancer ses appareils électroménagers en journée, recharger un véhicule électrique aux heures d’ensoleillement ou investir dans des batteries domestiques. Or, ces dernières, bien que de plus en plus performantes, représentent encore un coût important — souvent entre 8 000 et 15 000 CHF pour une maison familiale.

Aides et subventions : un soutien limité

La Confédération et plusieurs cantons continuent d’accorder des subventions pour encourager l’installation de panneaux solaires. Ces aides allègent le coût initial, mais elles ne suffisent pas à compenser l’allongement des délais de retour sur investissement.

De plus, les modalités varient d’un canton à l’autre : dans certaines communes, la subvention couvre à peine 10 % du projet, tandis que dans d’autres, elle peut atteindre 30 %. Les propriétaires doivent donc calculer soigneusement la viabilité de leur investissement avant de se lancer.

Un choix stratégique au-delà du financier

Malgré ce recul de la rentabilité pure, le photovoltaïque conserve des atouts indéniables. Produire sa propre énergie permet de réduire sa dépendance aux fluctuations du marché, d’anticiper de futures hausses de prix et de participer à la souveraineté énergétique nationale.

L’impact environnemental est également central : chaque installation contribue à réduire les émissions de CO₂ et à soutenir les objectifs climatiques fixés par la Suisse. Par ailleurs, la présence de panneaux solaires peut accroître la valeur immobilière d’un bien, de plus en plus d’acheteurs recherchant des maisons prêtes à répondre aux exigences énergétiques de demain.

Vers un nouveau modèle économique ?

Face à cette baisse de rentabilité, le secteur pourrait se réinventer. Certains experts appellent à une meilleure rémunération de l’injection, d’autres misent sur l’optimisation intelligente de la consommation, le couplage avec des pompes à chaleur ou encore la création de communautés énergétiques locales où la production serait partagée et valorisée collectivement.

À moyen terme, l’essor des batteries domestiques et une évolution du cadre réglementaire pourraient redonner un nouveau souffle au photovoltaïque. Mais pour l’instant, l’investissement n’est plus une évidence économique : il repose moins sur une logique de profit rapide que sur une vision de long terme, à la croisée de la transition énergétique et de la responsabilité écologique.